Étienne Durand 

 
   

Pourquoi pour mon malheur eus-je l’œil si léger ?
Pourquoi le sens si prompt, et l’esprit si fragile,
Que de voir, que d’aimer, et que de m’engager
À servir un bel œil d’un labeur inutile ?
 
Pour avoir vu je meurs, mais d’une mort subtile
Qui renaît d’elle-même et ne fait que changer,
Pour aimer je me vois tous les jours outrager,
Et servant je languis en ma prison servile.
 
L’œil, le sens et l’esprit, trop prompt, trop clair, trop vif,
M’a trompé, m’a séduit, m’a fait être captif
D’un attrait, d’un propos, d’un amoureux cordage.
 
Pour avoir vu, aimé et servi son bel œil,
L’ardeur, l’amour, les fers, me mènent au cercueil.
Dieux ! faites pour le moins que la mort me soulage !