Abraham de Vermeil 

 
   

Je m’embarque joyeux et ma voile pompeuse
M’ôte déjà la terre et me donne les mers,
Je ne vois que le Ciel uni aux sillons pers ;
C’est le premier état de mon âme amoureuse.
 
Puis je vois s’élever une vapeur confuse,
Ombrageant tout le Ciel qui se fend en éclairs ;
Le tonnerre grondant s’anime par les airs,
C’est le second état dont elle est langoureuse.
 
Le troisième est le flot hideusement frisé,
Le mât rompu des vents et le timon brisé,
Le navire enfondrant la perte de courage.
 
Le quatrième est la mort entre les flots salés
Abattus, rebattus, vomis et avalés ;
Bref mon Amour n’est rien qu’un horrible naufrage.

 

   

Je m’embarque joyeux et ma voile pompeuse
M’oste desja la terre et me donne les mers,
Je ne voi que le Ciel uni aux sillons pers ;
C’est le premier estat de mon ame amoureuse.
 
Puis je voi s’eslever une vapeur confuse,
Ombrageant tout le Ciel qui se fend en éclairs ;
Le tonnerre grondant s’anime par les airs,
C’est le second estat dont elle est langoureuse.
 
Le troisiesme est le flot hideusement frisé,
Le mast rompu des vents et le timon brisé,
Le navire enfondrant la perte de courage.
 
Le quatriesme est la mort entre les flots salez
Abattus, rebatus, vomis et avalez ;
Bref mon Amour n’est rien qu’un horrible naufrage.