Juke-Box à Poésie › Paul-Jean Toulet | |||
Dans le lit vaste et dévasté... Dans le lit vaste et dévasté J’ouvre les yeux près d’elle ; Je l’effleure : un songe infidèle L’embrasse à mon côté. Une lueur tranchante et mince Échancre mon plafond, Très loin, sur le pavé profond, J’entends un seau qui grince... Dans le silencieux automne... Dans le silencieux automne D’un jour mol et soyeux, Je t’écoute en fermant les yeux, Voisine monotone. Ces gammes de tes doigts hardis, C’étaient déjà des gammes Quand n’étaient pas encor des dames Mes cousines, jadis ; Et qu’aux toits noirs de la Rafette, Où grince un fer changeant, Les abeilles d’or et d’argent Mettaient l’aurore en fête. | Éléphant de Paris Ah, Curnonsky, non plus que l’aube, N’était bien rigolo. Il regardait le fil de l’eau. C’était avant les Taube. Et moi j’apercevais - pourtant Qu’on fût loin de Cythère - Un objet singulier. Mystère : C’était un éléphant. Notre maison étant tout proche, On le prit avec nous. Il mettait, pour chercher des sous Sa trompe dans ma poche. Hélas, rue-de-Villersexel, La porte était trop basse. On a beau dire que tout passe. Non - ni le riche au Ciel. En Arles Dans Arle, où sont les Aliscams, Quand l’ombre est rouge, sous les roses, Et clair le temps, Prends garde à la douceur des choses. Lorsque tu sens battre sans cause Ton cœur trop lourd ; Et que se taisent les colombes : Parle tout bas, si c’est d’amour, Au bord des tombes. J’ai vu le Diable, l’autre nuit... J’ai vu le Diable, l’autre nuit ; Et, dessous sa pelure, Il n’est pas aisé de conclure S’il faut dire : Elle, ou : Lui. Sa gorge, — avait l’air sous la faille, De trembler de désir : Tel, aux mains près de le saisir, Un bel oiseau défaille. Telle, à la soif, dans Blidah bleu, S’offre la pomme douce ; Ou bien l’oronge, sous la mousse, Lorsque tout bas il pleut. — « Ah ! » dit Satan, et le silence Frémissait à sa voix, « Ils ne tombent pas tous, tu vois, Les fruits de la Science ». | ||
Le juke-box à poésie
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