Les asiles d'aliénés sont des réceptacles de magie noire
conscients et prémédités,
et ce n'est pas seulement que les médecins favorisent la
magie par leurs thérapeutiques intempestives et hybrides,
c'est qu'ils en font.
S'il n'y avait pas eu de médecins
il n'y aurait jamais eu de malades,
pas de squelettes de morts
malades à charcuter et dépiauter,
car c'est par les médecins et non par les malades que la
société a commencé.
Ceux qui vivent, vivent des morts.
Et il faut aussi que la mort vive ;
et il n'y a rien comme un asile d'aliénés pour couver
doucement la mort, et tenir en couveuse des morts.
Cela a commencé 4000 ans avant Jésus-Christ cette
thérapeutique de la mort lente,
et la médecine moderne, complice en cela de la plus
sinistre et crapuleuse magie, passe ses morts à
l'électro-choc ou à l'insulinothérapie afin de bien
chaque jour vider ses haras d'hommes de leur moi,
et de les présenter ainsi vides,
ainsi fantastiquement
disponibles et vides,
aux obscènes sollicitations anatomiques et atomiques
de l'état appelé Bardo, livraison du barda de vivre aux
exigences de non-moi.
Le Bardo est l'affre de mort dans lequel le moi tombe
en flaque,
et il y a dans l'électrochoc un état flaque
par lequel passe tout traumatisé,
et qui lui donne, non plus à cet instant de connaître,
mais d'affreusement et désespérément méconnaître
ce qu'il fut, quand il était soi, quoi, loi, moi, roi, toi, zut et ÇA.
J'y suis passé et ne l'oublierai pas.
La magie de l'électrochoc draine un râle, elle plonge le
commotionné dans ce râle par lequel on quitte la vie (...)
Or, je le répète, le Bardo c'est la mort, et la mort n'est
qu'un état de magie noire qui n'existait pas il n'y a pas
si longtemps.
Créer ainsi artificiellement la mort comme la médecine
actuelle l'entreprend c'est favoriser un reflux du néant
qui n'a jamais profité à personne,
mais dont certains profiteurs prédestinés de l'homme
se repaissent depuis longtemps.
En fait, depuis un certain point du temps.
Lequel ?
Celui où il fallut choisir entre renoncer à être homme ou
devenir un aliéné évident.
Mais quelle garantie les aliénés évidents de ce monde
ont-ils d'être soignés par d'authentiques vivants ?
Farfadi
Ta azor
Tau ela
Auela
A
Tara
Ila
FIN
Une page blanche pour séparer le texte du livre qui est
fini de tout le grouillement du Bardo qui apparaît dans
les limbes de l'électrochoc.
Et dans ces limbes une typographie spéciale, laquelle
est là pour abjecter dieu, mettre en retrait les paroles
verbales auxquelles une valeur spéciale a voulu être
attribuée.