8° - L'homme, quand on ne le tient pas, est un animal
érotique,
il a en lui un tremblement inspiré,
une espèce de pulsation
productrice de bêtes sans nombre qui sont la forme que
les anciens peuples terrestres attribuaient
universellement à dieu.
Cela faisait ce qu'on appelle un esprit.
Or, cet esprit venu des Indiens d'Amérique ressort un peu
partout aujourd'hui sous des allures scientifiques qui ne
font qu'en accuser l'emprise infectieuse morbide, l'état
accusé de vice, mais d'un vice qui pullule de maladies,
parce que, riez tant que vous voudrez,
mais ce qu'on a appelé les microbes
c'est dieu,
et savez-vous avec quoi les Américains et les Russes font
leurs atomes ?
Ils les font avec les microbes de dieu.
- Vous délirez, monsieur Artaud.
Vous êtes fou.
- Je ne délire pas.
Je ne suis pas fou.
Je vous dis qu'on a réinventé les microbes afin d'imposer
une nouvelle idée de dieu.
On a trouvé un nouveau moyen de faire ressortir dieu et de
le prendre sur le fait de sa nocivité microbienne.
C'est de le clouer au coeur,
là où les hommes l'aiment le mieux,
sous la forme de la sexualité maladive,
dans cette sinistre apparence de cruauté morbide qu'il revêt
aux heures où il lui plaît de tétaniser et d'affoler comme
présentement l'humanité.
Il utilise l'esprit de pureté d'une conscience demeurée
candide comme la mienne pour l'asphyxier de toutes les
fausses apparences qu'il répand universellement dans
les espaces et c'est ainsi qu'Artaud le Mômo peut prendre
figure d'halluciné.
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