Anne HEBERT (1916)


Mystère de la parole (1960)

Saison aveugle

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Saison aveugle
Longtemps nous avons gardé des jours anciens en liberté dans les chambres du fond


Les avons lâchés dans toute la maison, livrés au temps et remis en marche comme des songes


Se sont promenés de chambre en chambre, toute figure reprise à mesure au fil des miroirs


Se sont usés, se sont fanés de la salle au vestibule où surgit l'éclat jaune du matin par la porte ouverte


Vint l'été criblé de balles, l'image mère s'est couchée pour mourir


Virent les souvenirs au point violet des places trop bleues et s'épluchent nos coeurs comme des noix


Pour une plus pure amande verte, nos mains nues, ô saison aveugle.


Anne HEBERT

© Boréal/Seuil


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