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LE CIEL DANS LA TERRE Resplendissant doux jardin de couvent Il n'y a rien de plus reluisant que ta folle plante Rien de plus amoureux que le jour à ton sein Rien de plus chaste que ta sueur claire De silence de méditations et d'oiseaux verts. ON VOIT Les pommiers sont en fleur La chair et le matin Et font de l'allée un chemin de Marie Mais personne ; l'air pur La terre est préparée mais aucune ne vient. JALOUSIE Vos vieux paniers au printemps Vos jeunes bas blancs dans l'herbe Vos voiles rabattus, vos dents Vos renoncements sont secrets Sans âge, enviées par le Maître. LE SEXE DE L'ÉPOUSE La grande fille de religion Va dans la chaleur conservée De la terre, du reflet, du mur Afin de ne vivre qu'à Dieu elle divise la lumière Et surnaturelle élégance Le corps lui est supprimé. LE JARDINAGE Par l'amour et non par la crainte, Aussi travaillons-nous par deux Sur les sentiers à peine vifs, Et nous séparons la lumière Notre ombre fait suite à nos mains Ce sont nos dernières mains. [...] L'AMOUR Portant les cloches de verre Pour la plante, elles n'ont jamais vu le sommeil La liberté ni le désir Ni le nuage ne les aiment, Une caresse de leur corps Est pour toujours enfoncée dans les limbes. BLESSURE Elles ne blessent pas leur corps Mais le chemin des sens est sous le bois vert ; Dieu fit un martyre d'amour Par lequel passeraient ces filles Mort journalière Vie toute morte On ne les voit pas saigner sur ce chemin. ET LA NUIT Lumière, dore encor les faîtes Feuilles, crevez le sombre bois Du soir, et passe oeil humide, Elles songent au bois sans feuilles Méditent trois larmes de sang Qui ne sont sur le ciel ni dans le vase d'or. [...] VALLÉE DE LARMES Trois lys jaunes Sont sortis de terre entre plusieurs fonds noirs D'averse abominable, Image De la satisfaction qu'éprouve Dieu. D'autres iris bleus vinrent un autre jour Et les chemins pareils aux serpents secs Les entourent, les empêchent de s'enfuir Car le matin n'est ni froid ni chaud ni clair ni ombre Il est utile, Et ce monde est bien l'endroit de la tentation. [...] LES MANES Dimanche est presque vert On voit l'asile en fer du jardinage. Des prairies au début la rage est trop violente, Pendant la mort des filles, un groupe d'invisibles Se présente à la terre Et fait l'amour sans déranger même les oiseaux. Plus loin passent les coeurs blessés, mânes Défavorables Attendris et plaintifs Ils se meuvent, ils vont, jamais ils n'ont de honte. L'ESPRIT JEUNE Les arbres quand on les mesure sont bleus de joie La terre quand on la suit est passionnément rousse Le ciel quand on le dévisage est rose ou même lilas ; Les graminées plongeant comme la mer La force appuie sur nous Les esprits du côté du vent font leur prière Les cheminées fument dans l'adoration ; La musique de la contemplation saisit les oiseaux Parce que l'âme est étendue plus haut que l'espace Et plus haut que les conceptions et que l'Amour. [...]
© Mercure de France
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