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Quelquefois je suis plein de grandes voix anciennes, Et je revis un peu l'enfance en la villa ; Je me retrouve encore avec ce qui fut là Quand le soir nous jetait de l'or par les persiennes. Et dans mon âme alors soudain je vois groupées Mes soeurs à cheveux blonds jouant près des vieux feux ; Autour d'elles le chat rôde, le dos frileux, Les regardant vêtir, étonné, leurs poupées. Ah ! la sérénité des jours à jamais beaux Dont sont morts à jamais les radieux flambeaux, Qui ne brilleront plus qu'en flammes chimériques : Puisque tout est défunt, enclos dans le cercueil, Puisque, sous les outils des noirs maçons du Deuil, S'écroulent nos bonheurs comme des murs de briques !
Des soirs, j'errais en lande hors du hameau natal, Perdu parmi l'orgueil serein des grands monts roses, Et les Anges, à flots de longs timbres moroses, Ébranlaient les bourdons, au vent occidental. Comme un berger-poète au coeur sentimental, J'aspirais leur prière en l'arôme des roses, Pendant qu'aux ors mourants, mes troupeaux de névroses Vagabondaient le long des forêts de santal. Ainsi, de par la vie où j'erre solitaire, J'ai gardé dans mon âme un coin de vieille terre, Paysage ébloui des soirs que je revois ; Alors que, dans ta lande intime, tu rappelles, Mon coeur, ces angélus d'antan, fanés, sans voix : Tous ces oiseaux de bronze envolés des chapelles !
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