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Cinq heures du soir. Depuis huit jours, j'avais déchiré mes bottines Aux cailloux des chemins. J'entrais à Charleroi. - Au Cabaret-Vert : je demandai des tartines De beurre et du jambon qui fût à moitié froid. Bienheureux, j'allongeai les jambes sous la table Verte : je contemplai les sujets très naïfs De la tapisserie. - Et ce fut adorable, Quand la fille aux tétons énormes, aux yeux vifs, - Celle-là, ce n'est pas un baiser qui l'épeure ! - Rieuse, m'apporta des tartines de beurre, Du jambon tiède, dans un plat colorié, Du jambon rose et blanc parfumé d'une gousse D'ail, - et m'emplit la chope immense, avec sa mousse Que dorait un rayon de soleil arriéré. Octobre 70.
Quand le front de l'enfant, plein de rouges tourmentes, Implore l'essaim blanc des rêves indistincts, Il vient près de son lit deux grandes soeurs charmantes Avec de frêles doigts aux ongles argentins. Elles assoient l'enfant auprès d'une croisée Grande ouverte où l'air bleu baigne un fouillis de fleurs Et, dans ses lourds cheveux où tombe la rosée, Promène leurs doigts fins, terribles et charmeurs. Il écoute chanter leurs haleines craintives Qui fleurent de longs miels végétaux et rosés Et qu'interrompt parfois un sifflement, salives Reprises sur la lèvre ou désirs de baisers. Il entend leurs cils noirs battant sous les silences Parfumés ; et leurs doigts électriques et doux Font crépiter, parmi ses grises indolences, Sous leurs ongles royaux, la mort des petits poux. Voilà que monte en lui le vin de la Paresse, Soupir d'harmonica qui pourrait délirer : L'enfant se sent, selon la lenteur des caresses, Sourdre et mourir sans cesse un désir de pleurer.
I LES PARENTS Nous sommes tes Grands-Parents. Les Grands ! Couverts des froides sueurs De la lune et des verdures. Nos vins secs avaient du coeur ! Au soleil sans imposture Que faut-il à l'homme ? boire. MOI - Mourir aux fleuves barbares. Nous sommes tes Grands-Parents Des champs. L'eau est au fond des osiers : Vois le courant du fossé Autour du château mouillé. Descendons en nos celliers ; Après, le cidre et le lait... MOI - Aller où boivent les vaches. Nous sommes tes Grands-Parents ; Tiens, prends Les liqueurs dans nos armoires ; Le Thé, le Café, si rares, Frémissent dans les bouilloires. - Vois les images, les fleurs. Nous rentrons du cimetière. MOI - Ah ! tarir toutes les urnes ! II L'ESPRIT Éternelles Ondines Divisez l'eau fine. Vénus, soeur de l'azur, Émeus le flot pur. Juifs errants de Norwège Dites-moi la neige. Anciens exilés chers, Dites-moi la mer. MOI - Non, plus ces boissons pures, Ces fleurs d'eau pour verres, Légendes ni figures Ne me désaltèrent ; Chansonnier, ta filleule C'est ma soif si folle Hydre intime sans gueules Qui mine et désole. III LES AMIS Viens, les Vins vont aux plages, Et les flots par millions ! Vois le Bitter sauvage Rouler du haut des monts ! Gagnons, pélerins sages, L'Absinthe aux verts piliers... MOI - Plus ces paysages. Qu'est l'ivresse, Amis ? J'aime autant, mieux, même, Pourrir dans l'étang, Sous l'affreuse crème. Près des bois flottants. IV LE PAUVRE SONGE Peut-être un Soir m'attend Où je boirai tranquille En quelque vieille Ville, Et mourrai plus content : Puisque je suis patient ! Si mon mal se résigne, Si j'ai jamais quelque or, Choisirai-je le Nord Ou le pays des Vignes ?... - Ah, songer est indigne Puisque c'est pure perte ! Et si je redeviens Le voyageur ancien, Jamais l'auberge verte Ne peut bien m'être ouverte. V CONCLUSION Les pigeons qui tremblent dans la prairie, Le gibier, qui court et qui voit la nuit, Les bêtes des eaux, la forêt asservie, Les derniers papillons !... ont soif aussi. Mais fondre où fond ce nuage sans guide, - Oh ! favorisé de ce qui est frais ! Expirer en ces violettes humides Dont les aurores chargent ces forêts ?
Si j'ai du goût, ce n'est guère Que pour la terre et les pierres. Je déjeune toujours d'air, De roc, de charbons, de fer. Mes faims, tournez. Paissez, faims, Le pré des sons. Attirez le gai venin Des liserons. Mangez les cailloux qu'on brise, Les vieilles pierres d'églises ; Les galets des vieux déluges, Pains semés dans les vallées grises. ¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯ Le loup criait sous les feuilles En crachant les belles plumes De son repas de volailles : Comme lui je me consume. Les salades, les fruits N'attendent que la cueillette ; Mais l'araignée de la haie Ne mange que des violettes. Que je dorme ! que je bouille Aux autels de Salomon. Le bouillon court sur la rouille, Et se mêle au Cédron.
À ma soeur Léonie Aubois d'Ashby. Baou - l'herbe d'été bourdonnante et puante. - Pour la fièvre des mères et des enfants.
À lulu. - démon - qui a conservé un goût pour les oratoires du temps des Amies et de son éducation incomplète. Pour les hommes - À madame ***.
À l'adolescent que je fus. À ce saint vieillard, ermitage ou mission.
À l'esprit des pauvres. À un très haut clergé.
Aussi bien à tout culte en telle place de culte mémoriale et parmi tels événements qu'il faille se rendre, suivant les aspirations du moment ou bien notre propre vice sérieux.
Ce soir à Circeto des hautes glaces, grasse comme le poisson, et enluminée comme les dix mois de la nuit rouge, - (son coeur ambre et spunk), - pour ma seule prière muette comme ces régions de nuit et précédant des bravoures plus violentes que ce chaos polaire.
À tout prix et avec tous les airs, même dans des voyages métaphysiques. - Mais plus alors.
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