Pour le consacrer ici, gardons-nous de nacrer trop cet
objet de tous les jours. Nulle ellipse prosodique, si
brillante qu’elle soit, pour assez platement dire l’humble
interposition de porcelaine entre l’esprit pur et l’appétit.
Non sans quelque humour, hélas (la bête s’y tenant
mieux !), le nom de sa belle matière d’un coquillage fut pris.
Nous, d’espèce vagabonde, n’y devons pas nous asseoir. On
la nomma porcelaine, du latin — par analogie — porcelena,
vulve de truie... Est-ce assez pour l’appétit ?
Mais toute beauté qui, d’urgence, naît de l’instabilité des
flots, prend assiette sur une conque... N’est-ce trop pour
l’esprit pur ?
L’assiette, quoi qu’il en soit, naquit ainsi de la mer :
d’ailleurs multipliée aussitôt par ce jongleur bénévole
remplaçant parfois en coulisse le morne vieillard qui nous
lance à peine un soleil par jour.
C’est pourquoi tu la vois ici sous plusieurs espèces
vibrant encore, comme ricochets s’immobilisant sur la
nappe sacrée du linge.
Voilà tout ce qu’on peut dire d’un objet qui prête à
vivre plus qu’il n’offre à réfléchir.