Alphonse BeauregardLe Val

 
   

Je connais, dans les Appalaches,
Un val séduisant qui se cache
      Comme un rêve ingénu ;
Un val aux pentes fantaisistes
Où se promène, dans les schistes,
      Un ruisseau bienvenu.
 
Quand, brusquement, on le découvre
C’est un avenir clair qui s’ouvre,
      Un sourire enjôleur
À quoi l’âme n’était pas prête.
On subit le charme, on s’arrête
      À l’offre de bonheur.
 
Ici qu’il serait doux de vivre !
On s’imagine avec un livre,
      Assis sous un pommier.
On a maison, femme et bagage...
Mais on pense au but du voyage,
      Aux tracas coutumiers.
 
Les yeux ravis on part, on gagne
Le grand chemin ou la montagne ;
      Au val on dit adieu,
Plein du pressentiment morose
D’abandonner, parce qu’on n’ose
      Un destin radieux.