Une honnête famille où il n’y a jamais eu de
banqueroute, où personne n’a jamais été pendu.
La Paternité de Jean de Nivelle.
Le pouce est ce gras cabaretier flamand, d’humeur goguenarde et grivoise,
qui fume sur sa porte, à l’enseigne de la double bière de mars.
L’index est sa femme, virago sèche comme une merluche, qui, dès le matin,
soufflette sa servante dont elle est jalouse, et caresse la bouteille dont
elle est amoureuse.
Le doigt du milieu est leur fils, compagnon dégrossi à la hache, qui serait
soldat s’il n’était brasseur, et qui serait cheval s’il n’était homme.
Le doigt de l’anneau est leur fille, leste et agaçante Zerbine, qui vend
des dentelles aux dames, et ne vend pas ses sourires aux cavaliers.
Et le doigt de l’oreille est le Benjamin de la famille, marmot pleureur
qui toujours se brimbale à la ceinture de sa mère comme un petit enfant pendu
au croc d’une ogresse.
Les cinq doigts de la main sont la plus mirobolante giroflée à cinq feuilles
qui ait jamais brodé les parterres de la noble cité de Harlem.