Paul-Jean TouletDernier amour

 
   

Lassé d’avoir vécu le masque et le mensonge,
De polir sous ma lèvre un marbre inhabité,
D’inscrire à l’almanach quelque nom qui prolonge
La figure d’un vice, et ce qu’il m’a coûté ;
 
Auparavant que l’heure, en m’éveillant de songe,
Sonne le couvre-feu à mon cœur irrité,
Je voudrais, comme au cours d’un fleuve où l’on se plonge,
Revenir à la règle et la simplicité.
 
Dans les jardins où dort mon antique province,
Celle qui doit m’aimer a grandi claire et mince,
Les fleurs ont plus de ride, et d’ombre les oiseaux.
 
Je la vis, par un soir doré, cueillant aux treilles
Le raisin couleur d’ambre avec de grands ciseaux
Dont le bruit argentin effrayait les abeilles.