Andrée SodenkampMargareta Matiena de Bohême

 
   

À Madame Émilie Noulet

Ma Mère d’autrefois, Ma Mère des guimbardes,
Ogresse du beau temps, voleuse d’horizons,
Vous qui faisiez le feu avec la paix des arbres
Et qui aviez l’Été pour immense maison.
 
Pourquoi m’avoir donnée à la race marchande,
Vendue aux bonnes gens pour quatre aunes de pré ?
Que j’aurais mieux grandi, bercée à votre hanche
Quand le vent est la mer où l’on peut naviguer
 
Puis traînant après moi de noirs enfants superbes,
J’aurais pillé l’amour, les granges et les fruits
À l’ombre des chevaux, dans la poigne de l’herbe,
Mes larges flancs heureux, que j’aurais bien dormi.
 
Ma Mère sans pays qui marchez dans mon sang
Pourquoi m’avoir jetée hors des sorcelleries ?
Il me faut donc mourir sur le vieux sol flamand
Comme un loup attaché au bord des bergeries.

 

© Droits réservés