Joachim Du Bellay 

 
   

Cependant que Magny suit son grand Avanson,
Panjas son Cardinal, et moi le mien encore,
Et que l’espoir flatteur, qui nos beaux ans dévore,
Appâte nos désirs d’un friand hameçon,
 
Tu courtises les rois, et, d’un plus heureux son,
Chantant l’heur de Henri, qui son siècle décore,
Tu t’honores toi-même, et celui qui honore
L’honneur que tu lui fais par ta docte chanson.
 
Las, et nous cependant nous consumons notre âge
Sur le bord inconnu d’un étrange rivage,
Où le malheur nous fait ces tristes vers chanter :
 
Comme on voit quelquefois quand la mort les appelle,
Arrangés flanc à flanc parmi l’herbe nouvelle,
Bien loin sur un étang trois cygnes lamenter.

 

   

Cependant que Magny suit son grand Avanson,
Panjas son Cardinal, et moy le mien encore,
Et que l’espoir flateur, qui noz beaux ans devore
Appaste noz desirs d’un friand hamesson,
 
Tu courtises les Roys, et d’un plus heureux son
Chantant l’heur de Henry, qui son siecle decore,
Tu t’honores toymesme, et celuy qui honore
L’honneur que tu luy fais par ta docte chanson.
 
Las, et nous ce pendant nous consumons nostre aage
Sur le bord incogneu d’un estrange rivage,
Où le malheur nous fait ces tristes vers chanter:
 
Comme on voit quelquefois, quand la mort les appelle,
Arrengez flanc à flanc parmy l’herbe nouvelle,
Bien loing sur un estang trois cygnes lamenter.