Joachim Du Bellay 

 
   

Je ne veux point fouiller au sein de la nature,
Je ne veux point chercher l’esprit de l’univers,
Je ne veux point sonder les abîmes couverts
Ni dessiner du ciel la belle architecture.
 
Je ne peins mes tableaux de si riche peinture,
Et si hauts arguments ne recherche à mes vers :
Mais suivant de ce lieu les accidents divers,
Soit de bien, soit de mal, j’écris à l’aventure.
 
Je me plains à mes vers, si j’ai quelque regret,
Je me ris avec eux, je leur dis mon secret,
Comme étant de mon cœur les plus sûrs secrétaires.
 
Aussi ne veux-je tant les pigner et friser,
Et de plus braves noms ne les veux déguiser,
Que de papiers journaux, ou bien de commentaires.

 

   

Je ne veulx point fouiller au sein de la nature,
Je ne veulx point chercher l’esprit de l’univers,
Je ne veulx point sonder les abysmes couvers,
Ny desseigner du ciel la belle architecture.
 
Je ne peins mes tableaux de si riche peinture,
Et si haults arguments ne recherche à mes vers :
Mais suivant de ce lieu les accidents divers,
Soit de bien, soit de mal, j’escris à l’adventure.
 
Je me plains à mes vers, si j’ay quelque regret,
Je me ris avec eulx, je leur dy mon secret,
Comme estans de mon cœur les plus seurs secretaires.
 
Aussi ne veulx-je tant les pigner et friser,
Et de plus braves noms ne les veulx desguiser,
Que de papiers journaulx, ou bien de commentaires