Joachim Du Bellay 

 
   

Tu ne me vois jamais (Pierre) que tu ne die
Que j’étudie trop, que je fasse l’amour,
Et que d’avoir toujours ces livres à l’entour
Rend les yeux éblouis, et la tête alourdie.
 
Mais tu ne l’entends pas, car cette maladie
Ne me vient du trop lire ou du trop long séjour,
Ains de voir le bureau qui se tient chaque jour :
C’est, Pierre mon ami, le livre où j’étudie.
 
Ne m’en parle donc plus, autant que tu as cher
De me donner plaisir et de ne me fâcher :
Mais bien en cependant que d’une main habile
 
Tu me laves la barbe et me tonds les cheveux,
Pour me désennuyer, conte-moi si tu veux,
Des nouvelles du Pape, et du bruit de la ville.

 

   

Tu ne me vois jamais (Pierre) que tu ne die
Que j’estudie trop, que je face l’amour,
Et que d’avoir tousjours ces livres à l’entour,
Rend les yeux esblouïs, et la teste eslourdie.
 
Mais tu ne l’entends pas : car ceste maladie
Ne me vient du trop lire, ou du trop long sejour,
Ains de voir le bureau, qui se tient chacun jour :
C’est, Pierre mon amy, le livre où j’estudie.
 
Ne m’en parle donc plus, autant que tu as cher
De me donner plaisir, et de ne me fascher :
Mais bien en ce pendant que d’une main habile
 
Tu me laves la barbe, et me tonds les cheveulx,
Pour me desennuyer, conte moy, si tu veulx,
Des nouvelles du Pape, et du bruit de la ville.