Jean Ogier de Gombaud 

 
   

Durant la belle nuit dont mon âme ravie
Préférait les clartés à celles d’un beau jour,
J’écoutais murmurer au milieu de la Cour
Mille voix de louange et mille autres d’envie.
 
Je ne sais quelles morts plus douces que la vie
Faisaient sentir aux cœurs les charmes de l’amour,
Et de mille beautés qui brillaient à l’entour
L’un tenait pour Caliste et l’autre pour Sylvie.
 
Quand Philis vint montrer ses yeux armés de dards,
De tous les assistants attira les regards
Et des autres objets effaça la mémoire.
 
Sa présence à l’instant fit sentir sa vertu,
Et mon cœur fut saisi d’une secrète gloire
De la voir triompher sans avoir combattu.

 

   

Durant la belle nuit, dont mon ame rauie
   Preferoit les clartez à celles d’vn beau iour,
   I’escoutois murmurer, au milieu de la Cour,
   Mille voix de loüange, & mille autres d’enuie.
 
Ie ne sçay quelles morts plus douces que la vie,
   Faisoient sentir aux cœurs les charmes de l’Amour ;
   Et de mille beautez, qui brilloient à l’entour,
   L’vn tenoit pour Caliste, & l’autre pour Syluie.
 
Quand Philis vint monstrer ses yeux armez de dards,
   De tous les assistans, attira les regards,
   Et des autres obiets effaça la memoire.
 
Sa presence à l’instant fit sentir sa vertu,
   Et mon cœur fut saisi d’vne secrette gloire,
   De la voir triompher, sans auoir combatu.